La curiosité n’est pas mon vilain défaut

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Je suis d’un naturel curieux.
Pas à surveiller mes voisins et à vouloir tout savoir de la vie des autres.
Pas cette curiosité là.
J’aime comprendre. J’aime apprendre.
Alors je lis beaucoup et je pose des questions.
Parce qu’il n’y a pas de questions idiotes. Et que si je ne sais pas, il y a surement d’autres personnes dans mon cas à qui je pourrai donner la réponse au cas où on me la donne (c’est toujours la classe d’avoir la réponse quand les autres ne l’ont pas!)
Mais de temps en temps, il y a des choses que je ne comprends pas. Des logiques illogiques.

En ce moment et depuis longtemps, c’est plutôt la crise en Beaujolais.
Comme je l’avais expliqué dans mon précédent billet, la période des beaujolais nouveau arrivant, il faut toujours remettre les points sur les i avec les négoces (« faudrait peut être acheter le vin un prix décent pour que les vignerons puissent en vivre »). Apparemment, cela aurait l’air de s’arranger. Les caves coopératives auraient négocié avec les négoces et ils se seraient mis d’accord sur le prix. Il me semble qu’on a juste oublier de demander aux vignerons s’ils étaient d’accord. Mais les négoces et les caves coop (qui travaillent en étroite collaboration) disent que oui… (que les vignerons sont d’accord). Cet accord permettrait, je cite « de limiter la casse du côté des exploitations »… (on est très touché qu’ils s’en inquiètent).

Les vignerons n’ont pas trop le choix, à mon avis. Plus les jours passent, plus les marchés deviennent pressants, et plus il devient urgent de signer un contrat de vente si tu veux pas te retrouver le bec dans l’eau.

Je n’ai jamais compris pourquoi les caves coop vendaient aux négoces. Ils ont pourtant assez de volume pour « s’attaquer » aux mêmes marchés que ces derniers. Ils pourraient s’entourer de personnels compétents (des commerciaux aux dents longues sortants des grandes écoles de commerce) pour vendre la production? Pourquoi s’adressent-ils aux négoces?
Bref…

Cette année encore, de nombreuses parcelles vont s’arracher.
Le ras le bol, le découragement, la lassitude d’un monde figé dans une crise à qui l’on s’est attachée au fil des années.
Et c’est le moment de la dévitalisation…!
Et je suis effrayée, consternée, dépitée.

« Avant de procéder à l’arrachage des pieds de vigne, le viticulteur aura pris soins de dévitaliser la vigne au glyphosate après la récolte à la dose de 3 à 4% en mouillant le feuillage dans son intégralité. Le but de la dévitalisation est de détruire chimiquement le système racinaire pour éviter la survie des racines vecteurs de maladies (comme le court-noué). Cette dévitalisation doit se faire rapidement après avoir vendangé la parcelle afin de profiter du maximum de la surface foliaire active car certaines années, des gelées d’automne apparaissent peu de temps après la récolte, les feuilles sèches ne sont alors plus réceptives au désherbant. Cette dévitalisation est effectuée avec des panneaux récupérateurs en face par face dans les conditions météo favorables à la limitation de la dérive (sans vent). L’applicateur après avoir revêtu sa combinaison pour la préparation de son pulvérisateur réalisera ce traitement dangereux à l’abri dans sa cabine de tracteur. » (extrait du blog Alambic City)

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Voilà comment on remercie les parcelles de pépé de nous avoir permis de vivre pendant des décennies.
Le vigneron s’assure de ne rien laisser en vie après son passage. Peut être même pas lui d’ailleurs…

On ne se demande même pas si ces parcelles pourraient éventuellement intéresser un autre vigneron, en location par exemple…
J’ai connu un jeune vigneron du beaujolais qui a tenté de s’installer. Il a cherché des vignes un peu partout en beaujolais. Il n’a pas trouvé. Et on n’a même pas pu l’aider.
C’est un comble non?

Pourquoi nos représentants ne s’occupent-ils pas de ce problème. De créer par exemple des bourses d’échange. Il y a des vignerons qui exploitent des parcelles difficiles et d’autres qui arrachent des parcelles facilement mécanisables. Il y a des jeunes vignerons qui cherchent à s’installer ou à s’agrandir et d’autres qui arrachent… Le bruit court que personnes n’en veut… Mais a-t-on seulement demandé à qui que ce soit.

J’entends bien l’argument  » c’est ma vigne, j’en fais ce que je veux, si j’ai envie de tout tuer, c’est mon problème, ferme ta gueule, toi, tu n’y connais rien et puis quand on voit tes vignes comme elles sont entretenues etc ,etc... » (oui parce que quand t’es en bio, t’es toujours plus ou moins considéré comme un branleur tricheur qui doit éviter de parler de ces choses là, à part peut être avec des vignerons bio qui sont d’accord avec toi, alors on n’avance pas tellement). Evidemment, ça met un froid dans le débat. En plus, il n’y a même pas de débat. On ne s’y tente même pas.

Je suis juste choquée par cette solution extrême: la dévitalisation.
Je suis juste triste qu’on n’arrive pas à envisager autre chose que l’arrachage.

Et je trouve ça grotesque qu’on n’arrive pas à ouvrir des discussions et des débats sur ce problème là.
Peut-être parce que ça arrange le plus grand nombre.
Peut-être parce que certains sont encore assez idiots pour penser que « si le voisin arrache, il y aura moins de vin, et que s’il y a moins de vin, les prix aux négoces vont remonter ».
Ce ne sont que des foutaises. Les centaines d’hectares qui se sont arrachés depuis 10 ans n’ont rien résolu et cela continuera de la sorte. Certes, il y a moins de vin, mais les prix sont toujours à la baisse et de nombreuses cuves ne trouvent encore pas d’acheteur.
On se trompe de problème. Et c’est pour cette raison qu’on ne trouve pas de solution.

Nous vivons au milieu de tout ça. Je n’ai pas de solution miracle. Et on ne me demandera pas mon avis de toute façon. D’abord parce que je suis une femme et ensuite parce que nous sommes en bio et qu’en plus j’aime les vrais vins natures! (ce qui fera l’objet d’un billet prochainement d’ailleurs)
Je sais que je fais hérisser le poil de beaucoup. Qu’on m’aimerait plus silencieuse, plus consensuelle (con sensuelle!)
Je ne le suis pas. Je vous prie de m’excuser si je vous ai froissé.

Le Beaujolais, c’est ma terre d’adoption. C’est une région magnifique avec des vignerons attachés à leur racine. On a juste voulu leur faire croire qu’ils étaient de trop ou qu’ils ne faisaient pas comme il faut. Foutaises encore! A vouloir trop écouter ceux qui leur disaient comment faire, ils en ont oublié ce qu’ils savaient faire.

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1 commentaire

  1. Je comprend tout à fait cette indignation, d’autant plus que je me dirige vers mon installation prochainement et que je vois disparaître des très vieilles vignes sur des beaux terroirs. Mais quand on est pas, prêt on ne peut que regarder les vieilles mères mourir alors qu’elles nous donnerai certainement quelques décennies de jus concentré en minéraux et autres nutriments profondément ancré dans le sol…. dans mon cas il me reste toujours les yeux pour pleurer et l’espoir qu’il reste encore des vieux coucou quand je pourrai enfin me lancer pour de bon. Le problème de la sorcellerie des « bio » et autre défenseur des processus naturels on connait tous… pourquoi tant de haine du conventionnel envers le bio ? est-ce qu’on leur a fait du mal ? Non ……à part en vendant nos bouteilles 10 euros au lieu de 130 euro l’hecto ( faite le calcul ça fais 15 euro le litre en bio contre 1,3€ le litre en conventionnel).. La jalousie… c’est le nerf de la guerre mais faut bien se payer les heures de pioches et tout le travail manuel….. et puis le glyphosate ça coûte pas cher. 😉

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